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Les challenges qui attendent Binance post-CZ

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Les challenges qui attendent Binance post-CZ

Les challenges qui attendent Binance post-CZLes challenges qui attendent Binance post-CZ

Si Binance reste la plateforme numéro 1 en termes de volume et d’utilisateurs, elle va devoir profondément repenser son organisation pour se plier aux différentes réglementations. L’enjeu est désormais de se réinventer sans perdre son identité.

Un peu plus de 4 mois après sa condamnation, l’ancien emblématique patron de Binance, Changpeng Zhao, est sorti libre vendredi dernier de la maison de transition de Long Beach (Californie), où il purgeait le reste de sa peine prononcée le 30 avril dernier, après avoir trouvé un accord avec les autorités américaines incluant une amende de 4,3 milliards de dollars, en reconnaissant notamment les accusations de blanchiment d’argent. Un record pour une plateforme crypto et l’une des plus grosses amendes dans l’histoire de la finance.

Une étape importante pour celui qui est surnommé “CZ” puisqu’elle marque officiellement la fin de ses ennuis judiciaires aux Etats-Unis, mais surtout, une nouvelle page de développement pour la plateforme qu’il a fondée en 2017 à Shanghai avec Yi He avec laquelle il a entretenu une relation pendant plusieurs années.

Si CZ reste actionnaire de l’entreprise, l’accord avec la justice américaine lui interdit d’occuper des postes à responsabilité au sein de l’entreprise ou d’en influencer la direction stratégique.

Depuis novembre 2023 et sa démission, c’est Richard Teng qui occupe le poste de CEO. Tout un symbole, puisque le style beaucoup plus institutionnel du Singapourien tranche nettement avec celui de son prédécesseur et incarne une grande partie du futur de Binance.

Reconquérir le marché américain

Fin août, Richard Teng s’est rendu aux États-Unis pour rencontrer des contrôleurs ainsi que des fonctionnaires. Il a notamment présenté un plan de recrutement d’au moins 1 000 personnes, dont une grande partie à des postes de conformité, pour un montant dépassant les 200 millions de dollars.

Selon le nouveau PDG, la plateforme dispose actuellement d’environ 500 personnes chargées de la conformité. Ce nombre doit passer à 700 d’ici la fin de l’année. L’entreprise compterait 5 000 employés au total.

Si elle a payé une amende record, Binance est loin d’être sortie d’affaire, puisqu’elle a été placée sous supervision américaine pour les 5 prochaines années, dont 3 sur le territoire américain. Selon Richard Teng, les deux sociétés chargées de contrôler les efforts de la plateforme (Forensic Risk Alliance et Sullivan & Cromwell) ont déjà “commencé leur travail”.

Autre détail important : la SEC (Securities and Exchange Commission) ne fait pas partie de l’accord ayant abouti à l’amende et continue de poursuivre indépendamment la plateforme, notamment à cause de ses manquements relatifs à la réglementation liée aux titres financiers.

Pour le moment, le marché américain est largement fermé à Binance et son pendant américain, Binance US, qui a été contraint de licencier deux tiers de ses effectifs et enregistré une baisse de ses revenus de plus de 75 %. Mais pour combien de temps encore ?

L’élection présidentielle américaine pourrait avoir son importance, avec à la clé un déblocage permettant l’émergence d’une réglementation spécifique au secteur. Avec cet horizon, Binance apparaît comme un candidat crédible pour se tailler une part de ce marché, dont quasiment aucune entreprise n’imagine se passer.

Le compte à rebours a commencé en Europe

En Europe, les plateformes d’échanges devront impérativement disposer de l’agrément MiCA (Markets in Crypto-Assets), le règlement européen qui vise à harmoniser les différentes régulations crypto entre les 27 pays membres. Et pour le moment, Binance en est loin.

Les choses avaient pourtant bien démarré lorsque Changpeng Zhao, en novembre 2021, s’affichait aux côtés de Cédric O, alors ministre chargé du Numérique, pour annoncer l’arrivée de Binance dans l’Hexagone, qui souhaitait alors en faire sa place forte en Europe en y installant son siège social.

D’autant plus que le 5 mai 2022, la plateforme annonçait triomphalement l’obtention de son enregistrement comme prestataire de services sur actifs numériques (PSAN), seul sésame réglementaire alors demandé par les autorités pour opérer de manière régulée sur le territoire.

Une étape importante, car à l’époque déjà, Binance cherchait à entamer son grand virage réglementaire et à se débarrasser de son image “d’entreprise pirate”. Mais en deux ans, la situation s’est sérieusement compliquée.

En raison des affaires américaines, les autorités françaises ont mis au point mort le processus d’agrément de prestataire de services sur investissement (PSI), ce qui interdit à Binance de proposer à ses clients européens des produits dérivés crypto pour lesquels la plateforme était réputée, ainsi que son agrément PSAN, quasiment équivalent à l’agrément MiCA, qui faudra absolument détenir au printemps 2026 pour continuer à opérer (le simple enregistrement va disparaître).

La plateforme est également toujours visée par plusieurs enquêtes en France, notamment menées par la section du parquet de Paris chargée de lutter contre la criminalité organisée financière.

Binance a aussi perdu le droit de proposer sa carte bancaire de paiement aux utilisateurs européens et l’accès au réseau SEPA (Single Euro Payments Area), faute d’agréments ou de partenaires adéquats.

“L’équipe de Binance n’avait clairement pas la culture réglementaire suffisante et a commis beaucoup d’erreurs évitables à mon sens. C’est pourtant indispensable, particulièrement en Europe”, explique un ancien banquier qui a travaillé pour le groupe pendant quelques mois.

“Si la situation semble pour le moins compliquée, Binance est loin d’avoir abandonné la France et l’Europe”, explique à The Big Whale une source proche du dossier.

Pour continuer à présenter des dirigeants “honorables” après la condamnation de CZ, Binance France a changé d’actionnaire en mai dernier. Jusqu’ici unique actionnaire de la filiale, CZ a laissé sa place à Lihua He et Yulong Yan, tous deux de nationalité chinoise et présentés comme des membres de l’équipe fondatrice de Binance.

Début juin, la plateforme a également annoncé qu’elle allait restreindre l’accès aux stablecoins non régulés en Europe comme l’USDT de Tether, alors même que le 1er volet de MiCA les concernant est entré en application depuis le 1er juillet.

Même si pour le moment, de nombreux points restent flous notamment sur la date à laquelle les plateformes devront strictement les délister, Binance fait parti des acteurs ayant pris les devant. Ces derniers mois, la plateforme a notamment multiplié les listing de stablecoins euros dont notamment l’EURITE émis par la banque luxembourgeoise Banking Circle.

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Un changement de culture qui peut coûter cher

Malgré les différents fronts réglementaires et judiciaires auxquels est confronté Binance depuis maintenant plusieurs années, elle reste la plateforme numéro 1 sur le marché crypto.

Si elle est quasiment absente des flux libellés en dollars traditionnel, en raison de ses difficultés à accéder au système bancaire traditionnel, Binance concentre encore aujourd’hui plus d’un tiers des volumes crypto/crypto (données incluant les stablecoins) en totalisant 335 milliards de volumes d’échanges sur le mois de septembre 2024 sur un total de 945 milliards de dollars selon les données compilées par The Block.

Source: The Block

“Même si l’entreprise comporte encore une part d’ombre très importante, ses volumes lui permettent de proposer les meilleurs prix du marché. Même aujourd’hui, elle reste incontournable”, explique un dirigeant de PSAN français.

Binance reste également solidement implantée en Asie ou dans la région du Golfe via les Émirats Arabes Unis notamment, mais il lui sera impossible de se passer de régions comme l’Europe ou les États-Unis à long terme.

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L’entreprise va devoir recruter, ainsi que dépenser davantage dans le secteur de la conformité, et surtout faire évoluer ses produits, ce qui pourrait à terme porter préjudice à son image. Cette restructuration sera-t-elle de nature à éloigner sa clientèle historique via des contrôles KYC accrus ou encore un listing de cryptomonnaies plus restrictif ?

“La question est de savoir comment Binance pourra encore tirer son épingle du jeu en suivant scrupuleusement la réglementation”, explique un bon connaisseur du dossier. “Si elle a réussi à attirer un aussi grand nombre d’utilisateurs, c’est aussi parce qu’elle permettait des choses que ses concurrents plus régulés ne se permettaient pas”, souffle-t-il.

Dans leurs plaintes, les régulateurs américains ont notamment pointé du doigt le fait que la plateforme ne fasse pas de distinction claire entre Binance monde et ses filiales. Les nouvelles exigences des différents régulateurs pourraient ainsi nuire à la liquidité sur la plateforme, ce qui constituait jusqu’ici l’une de ses forces.

Enfin, le leadership incarné par CZ va forcément lui manquer. Si le style policé de Richard Teng paraît nettement plus adapté à la situation et de nature à rassurer les différents régulateurs à travers le monde, il n’aura pas la même capacité à rassembler une large partie de l’écosystème crypto.

“Richard Teng semble la personne la mieux placée pour enclencher ce changement de culture qui doit être profond. Trop d’erreurs vis-à-vis de la réglementation ont été commises par le passé”, souffle un proche de l’entreprise.

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