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Ripple : un avenir plus que jamais incertain

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Ripple : un avenir plus que jamais incertain

Ripple : un avenir plus que jamais incertainRipple : un avenir plus que jamais incertain

Empêtrée depuis deux ans dans une procédure qui l’oppose au gendarme boursier américain (SEC), la société américaine Ripple n’est plus que l’ombre d’elle-même. Ses partisans espèrent que la fin du procès, dont l’issue pourrait lui être favorable, lui permettra de se relancer. Mais est-ce vraiment possible ? Retour sur l’un des projets les plus clivants de l’écosystème crypto.

Pour beaucoup, cette sorte de descente aux enfers du XRP s'explique essentiellement par l’offensive judiciaire du gendarme financier américain (SEC) qui reproche depuis deux ans à Ripple d'avoir vendu aux Américains des titres financiers. L’issue de cette affaire est attendue d’ici la fin du premier semestre 2023.

Le procès cible également Chris Larsen et le patron actuel de la société basée à San Francisco, Brad Garlinghouse. La SEC accuse les deux hommes d'avoir vendu le jeton XRP pour s'enrichir personnellement, tout en sachant que celui-ci n'aurait qu'une très faible utilité réelle.

Dans la plainte, on peut lire que “Ripple a vendu des XRP à grande échelle sur le marché, en particulier à des investisseurs qui ne pourraient en faire aucun usage."

Pour bien comprendre l’affaire qui oppose aujourd’hui Ripple au régulateur américain, il faut revenir quelques années en arrière. “De nombreux acteurs du marché ne semblent pas connaître grand-chose de l'histoire de Ripple ou de la technologie sous-jacente”, persifle un expert.

👉 Le projet Ripple est né avant Bitcoin et Ethereum

L’histoire de Ripple a démarré en 2004, l’année de la création de Facebook (devenu Meta).

À l’époque, le projet s'appelait “RipplePay” et son concepteur, le Canadien Ryan Fugger, avait l’ambition de développer un réseau pair-à-pair pour réaliser des transactions financières internationales.

L’idée initiale s’attachait plus à mettre l’utilisateur particulier au centre, avant d’évoluer vers une proposition de remplacement du réseau interbancaire Swift utilisé depuis les années 1970 par les institutions financières.

Dans sa forme actuelle, Ripple fournit des services d’échange sur plusieurs paires de devises traditionnelles et peut stocker toutes les informations comptables des participants.

La grosse différence avec Swift, c’est que Ripple offre des échanges sécurisés et vérifiés par les participants du réseau via un mécanisme de consensus, le tout en temps réel et avec une solution open source.

“La proposition est intéressante mais n’offre pas une révolution radicale par rapport à Swift”, souligne un bon connaisseur du dossier, qui ajoute : “Pour que l’industrie bancaire bascule sur Ripple il faudrait que ce soit 1000 fois plus efficace et surtout que les banques soient plus impliquées dans la conception”.

L’expérimentation du Crédit agricole est éclairante à ce sujet. “Elle a été tout à fait concluante mais, entre-temps, nous avons trouvé une solution alternative équivalente qui nous a évité d’investir dans une autre chaîne de traitement”, nous a expliqué la banque française.

Le développement de la solution RipplePay est resté rudimentaire jusqu’en 2011, année où le protocole Bitcoin a commencé à gagner en popularité auprès des spécialistes. Ce moment symbolise aussi l’arrivée dans l’équipe d’une personnalité historique de l’écosystème bitcoin, l’Américain Jed McCaleb.

👉 Un pionnier du Bitcoin dans l’équipe

Jed McCaleb est connu pour avoir co-créé en 2000 le réseau de partage de fichiers eDonkey, mais aussi la plateforme d’échange de bitcoins MtGox en 2010 qu’il a ensuite revendue au Français Mark Karpelès en 2011 (victime d’un piratage massif en 2014).

Si nous sommes aujourd’hui habitués à utiliser Binance ou Coinbase, il n’y avait quasiment rien à l’époque. Jed McCaleb était une “star” dans le secteur et donc une prise assez incroyable pour Ripple.

Mais l’Américain a rapidement pris le contrôle du projet RipplePay, évinçant Ryan Fugger et s’associant à l’entrepreneur américain Chris Larsen en 2012. La start-up a ensuite changé plusieurs fois de nom, passant en quelques années de RipplePay à OpenCoin, Ripple Labs et enfin Ripple à partir de 2015.

Ripple a reçu en avril 2013 des financements de la part de géants du capital-risque comme Google Ventures et Andreessen Horowitz.

Plus tôt, le projet avait également obtenu le soutien financier de Jesse Powell, le fondateur de la plateforme d’échange Kraken (qui est l’une des plus importantes aujourd’hui) et Roger Ver, l’une des premières grandes figures médiatiques appelant à la démocratisation du bitcoin. Avec ces deux personnalités, l’objectif était tout trouvé : Ripple devait lancer une cryptomonnaie pour l’intégrer au système de transferts de fonds.

👉 Le XRP massivement distribué aux deux fondateurs

Le XRP a vu le jour en janvier 2013 avec une quantité limitée de 100 milliards de tokens. Un peu plus de 80 milliards ont été attribués à l'entreprise et… 18,5 milliards ont été donnés à Chris Larsen et Jed McCaleb.

Les tokens XRP sont au coeur du modèle économique de Ripple. C’est leur vente qui assure la quasi-totalité des rentrées d’argent à l’entreprise.

Aujourd’hui 50% des tokens sont disponibles, dont une partie a été achetée par des investisseurs particuliers. Entre 2016 et 2019, Ripple aurait gagné 1,2 milliard de dollars par ce biais, indique la SEC.

L’histoire de l'entreprise est émaillée par de nombreux conflits internes, ce qui a abouti au départ de Jed McCaleb autour de 2014 (il est parti fonder Stellar, un protocole concurrent qui partage beaucoup de points communs avec Ripple).

Jed McCaleb aurait fait les frais de la prise de contrôle progressive de Chris Larsen, soutenu par les nouveaux actionnaires. Il a néanmoins conservé la quasi-totalité de ses tokens et contribué à faire chuter le cours à chaque fois qu’il liquidait une nouvelle partie de son portefeuille. Jed McCaleb se serait débarrassé de ses derniers XRP il y a quelques mois.

À la différence du bitcoin et de l’ether, le XRP n’est pas généré en contribuant à la sécurisation du réseau. Il y a peu d’incitations financières à participer à son fonctionnement et on ne peut pas vraiment dire qu’il est correctement décentralisé, car les validateurs ont longtemps été contrôlés par Ripple et sont encore largement financés par l’organisation 😅

Ce qui est aussi dérangeant, c’est que le système Ripple peut fonctionner sans le XRP grâce à son produit “xCurrent”. Lors de son expérimentation menée en 2018, Crédit agricole n’avait ainsi pas eu recours au XRP.

👉 À quoi sert vraiment le XRP ?

Le XRP peut être utilisé en tant que compensation (par exemple en passant de l’euro vers le XRP pour obtenir du dollar) dans le cadre son autre produit, “xRapid”. C’est intéressant car, dans le cadre des transactions interdevises traditionnelles, le procédé est coûteux et peut prendre plusieurs jours. Ici, c’est quasiment instantané. Néanmoins, peu d’institutions financières l’ont adopté…

L'une des rares exceptions est MoneyGram. Le numéro deux des transferts de fonds internationaux (derrière Western Union) a fait entrer Ripple à son capital en 2019 (avec un rachat d’actions trois fois supérieur au prix du marché) dans le but de tester l’ensemble des produits de l’entreprise et favoriser leur adoption.

Ce partenariat s’est révélé fructueux pour MoneyGram qui recevait environ 10 millions de dollars par trimestre de la part de Ripple. Mais le partenariat s’est brutalement interrompu en février 2021 après le dépôt de plainte du régulateur américain…

Aujourd’hui, le sort de Ripple est intimement lié à la décision - attendue sous peu - de la justice américaine. “C’est peu probable que Ripple accepte un règlement à l’amiable car la société a montré beaucoup de combativité depuis le début du contentieux”, explique l’ancien avocat Victor Charpiat, fondateur de la start-up crypto Kolat. “Dans le cas où le XRP serait requalifié en titre financier, comme la SEC le suggère, Ripple s’exposerait à de lourdes sanctions”, souligne-t-il.

Ce dernier évoque le cas de Telegram qui avait été contraint d’abandonner son projet de cryptomonnaie début 2020 pour la même raison. “Cela avait causé beaucoup de problèmes à l’époque, car il avait fallu rembourser une partie des investisseurs américains qui avaient participé au financement du projet”, rappelle Victor Charpiat. Pour Ripple, le risque est grand : dès l’annonce de la plainte, de nombreuses Bourses cryptos ont annoncé le delisting du XRP pour leurs clients américains, dont Coinbase ou Kraken.

Son patron, Brad Garlinghouse, a d’ores et déjà prévenu que Ripple quitterait les États-Unis en cas de décision défavorable.

L’entreprise pourrait alors se tourner vers Singapour, le Royaume-Uni ou la Suisse, “des pays qui sont amicaux avec les cryptos”, avait-il déclaré l’été dernier.

Ce choix serait logique pour une entreprise qui réalise déjà le plus gros de son activité hors de son pays natal. Néanmoins, le XRP risquerait de devenir “toxique” aux yeux de nombreux investisseurs car on imagine mal le projet parvenir à remplacer le système Swift en cas de sanctions américaines…

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