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Rapport stablecoins 2024 : un écosystème toujours plus riche

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Rapport stablecoins 2024 : un écosystème toujours plus riche

Rapport stablecoins 2024 : un écosystème toujours plus richeRapport stablecoins 2024 : un écosystème toujours plus riche

The Big Whale vous propose un rapport complet sur l’ensemble des stablecoins du secteur crypto.

Les stablecoins représentent l'un des plus anciens cas d'usage des blockchains et celui ayant connu la plus grande adoption.

Aujourd'hui, ils représentent environ 10 % de la capitalisation totale du marché des cryptomonnaies, avec plus de 170 milliards de dollars d'unités en circulation. En juin 2020, ce chiffre atteignait à peine 10 milliards de dollars, selon les données compilées par Glassnode.

Leur principe est simple : permettre à quiconque d'échanger des tokens dont la valeur est arrimée à celle d'une monnaie traditionnelle (le dollar dans la plupart des cas).

La valeur d'un stablecoin est garantie par une réserve d'actifs que les utilisateurs peuvent réclamer en échange de leurs stablecoins. Ces actifs peuvent prendre diverses formes, telles que du cash déposé en banque ou, plus fréquemment, des obligations d'État, permettant ainsi aux émetteurs de stablecoins de générer des rendements sur leurs réserves.

Ce modèle économique très attractif a suscité l'émergence de nombreux concurrents désireux de profiter de ce marché en pleine expansion.

La demande pour les stablecoins continue de croître pour plusieurs raisons : l'efficacité accrue des paiements transfrontaliers, l'adoption du dollar dans les pays aux monnaies instables, l'intégration de valeurs stables au sein de la finance décentralisée (DeFi) et la gestion des comptes sur les plateformes de trading centralisées.

Pour répondre à l'évolution des différents cas d'usage, de nouvelles formes de stablecoins ne cessent d'émerger.

Les stablecoins centralisés

C'est actuellement le modèle le plus éprouvé de l'écosystème crypto. Dans cette configuration, une entreprise centralisée émet les jetons de stablecoins et contrôle la stratégie.

Les plus connus sont l'USDT de Tether et l'USDC de Circle. Ces deux stablecoins dominent le marché, représentant plus de 90 % de sa capitalisation totale avec respectivement 118 milliards et 35 milliards d'unités en circulation.

Bien que différents dans leur approche, ces deux stablecoins sont de puissants outils de soft power pour les États-Unis, diffusant le dollar à travers le monde via divers réseaux de blockchain publique.

Cette influence est telle que certaines figures politiques, comme Timothy G. Massad, ancien président de la CFTC (Commodity Futures Trading Commission) sous Barack Obama, qualifient publiquement la question de "sécurité nationale" et appellent à leur régulation.

Ces stablecoins sont également d'importants acheteurs de dette américaine. Leur modèle économique est simple : ils investissent la quasi-totalité de leurs réserves en bons du Trésor américain, dont le rendement avoisine actuellement les 5 % suite aux hausses de taux successives décidées par la Réserve fédérale américaine après la crise du COVID. Depuis plusieurs années, ils affichent logiquement des profits records.

Au 2ème trimestre 2024, Tether se classait 18ème parmi les détenteurs de dette américaine, devançant des pays comme l'Allemagne. Ce même trimestre, l'entreprise a annoncé un profit net de 5,2 milliards de dollars.

Contrairement à son principal concurrent, Circle ne publie pas de résultats financiers trimestriels. Pour le 1er semestre 2023, Circle a déclaré un chiffre d'affaires de 779 millions de dollars, dépassant largement son chiffre d'affaires de 772 millions de dollars pour l'ensemble de l'année 2022.

Tether, le leader controversé

S'ils dominent largement le marché, Tether et Circle s'opposent radicalement en termes d'approche.Bien que Tether soit en tête pour la capitalisation de marché, son stablecoin reçoit des évaluations médiocres. Standard & Poor's lui attribue la note de 4 sur 5 (5 étant la pire) dans son étude du 12 décembre, tandis que Bluechip, un organisme indépendant spécialisé dans la notation de stablecoins, lui décerne un D.

Ces notations s'expliquent principalement par le manque de transparence de Tether. Les informations sur son organigramme et ses partenaires bancaires sont rares, et sa réserve soulève de nombreuses interrogations.

Depuis le 1er trimestre 2023, Tether publie un audit présenté comme “indépendant”, réalisé par BDO Italia. Cependant, les doutes persistent. Un spécialiste souligne : “C'est un cabinet d'audit quasi inconnu.”

Pourquoi ne pas faire appel à un cabinet du “Big Four” (KPMG, EY, Deloitte, PwC) ? Selon une source proche de Tether, ces derniers refuseraient de collaborer avec l'entreprise.

Au 30 juin 2024, les réserves de Tether se composaient principalement de :

  • 84,24 % d'actifs liquides, notamment des bons du Trésor américain à court terme
  • 3,22 % de métaux précieux, dont l'or
  • 4 % de bitcoins

Garett Jones, cofondateur de Bluechip, avance : “Contrairement aux idées reçues, l'opacité de Tether constitue aussi sa force. Dévoiler publiquement les détails de leur fonctionnement pourrait se retourner contre eux, comme pour de nombreux acteurs financiers traditionnels.”

Ces dernières années, l'entreprise dirigée par Paolo Ardoino s'efforce d'améliorer son image. Elle a notamment recruté Jesse Spiro comme responsable des affaires publiques, fort d'une expérience similaire chez PayPal et Chainalysis.

Circle, le bon élève

Circle a toujours placé la régulation au cœur de sa stratégie de développement de l'USDC, lancé en janvier 2018 avec la plateforme Coinbase, dont elle est historiquement proche.

Le 1er juillet dernier, l'entreprise américaine a obtenu son agrément d'établissement de monnaie électronique (EME), un sésame indispensable pour émettre des stablecoins de manière régulée en Europe, conformément à la réglementation MiCA (Markets in Crypto-Assets). Cette réglementation vise à harmoniser les règles pour les actifs numériques dans l'Union européenne. À ce jour, très peu d'acteurs crypto ont obtenu ce feu vert.

En conséquence, Circle est habilité à proposer l'USDC et l'EURC, son stablecoin euro, aux utilisateurs européens. En revanche, Tether n'a pour le moment pas l'intention de se soumettre à la réglementation MiCA, comme l'a réaffirmé son PDG Paolo Ardoino dans une interview à The Big Whale.

Début janvier 2024, Circle annonçait travailler sur une introduction à la Bourse de New York. Ce sera la deuxième tentative après celle avortée en décembre 2022. L'entreprise américaine vise une valorisation d'environ 5 milliards de dollars. Auparavant basée à Dublin en Irlande, Circle a officiellement déplacé son siège social à New York, inaugurant ses nouveaux locaux le 13 septembre.

Les partenaires bancaires de Circle sont connus, tout comme son auditeur, le cabinet Deloitte. Ce dernier fournit un rapport mensuel sur l'état des réserves, exclusivement composées d'actifs tels que des bons du Trésor américain, libellés en dollars et conservés dans des comptes ségrégués. Néanmoins, tout n'est pas parfait.

“Les affirmations de Circle selon lesquelles les réserves de l'USDC seraient à l'abri de la faillite n'ont pas encore été prouvées, ce qui le rend moins sûr que les stablecoins supervisés par le NYDFS (le régulateur new-yorkais)”, déclare Vaidya Pallasena, responsable de la notation chez Bluechip. La preuve : l'USDC a momentanément perdu son indexation au dollar lors de la faillite de la Silicon Valley Bank au printemps 2023, une banque où Circle avait placé une partie de ses réserves.

Standard & Poor's considère l'USDC comme l'un des projets les plus sûrs de l'écosystème, lui attribuant une note de 2. Bluechip lui décerne la note de B+.

En mars 2023, la Silicon Valley Bank (SVB) s'est effondrée. Circle y étant en partie exposé, cela a créé une vague de panique menant au “depeg” de l'USDC, qui a chuté jusqu'à 0,7 $ avant de retrouver son équilibre.

DefiLlama

Le FDUSD, à la rescousse de Binance

Lancé en juin 2023 à Hong Kong, le FDUSD est émis par First Digital Group.

Actuellement, il se classe comme le 4ème plus grand stablecoin du marché avec près de 3 milliards d'unités en circulation. Sa croissance a été fulgurante : seulement 6 mois après son lancement, sa capitalisation de marché frôlait déjà le milliard de dollars.

Le principal moteur de cette croissance est la plateforme Binance. Celle-ci a commencé à le lister en août 2023 et a supprimé les frais sur la paire BTC/FDUSD. Ce rapprochement s'explique par la disparition programmée en février 2024 du BUSD, le stablecoin “maison” de Binance. Ce dernier avait été interdit par les autorités américaines en février 2022.

Les réserves du FDUSD sont conservées par un trust à Hong Kong, dont l'identité n'a pas été révélée publiquement. Au 31 août 2023, date du dernier pointage officiel, elles étaient composées à 79 % de dépôts en espèces et à 20 % de bons du Trésor américain à court terme.

Standard & Poor's sanctionne le FDUSD avec une note de 4 en raison de l'absence de ségrégation des actifs. Bluechip n'est pas plus clément et lui attribue un C.

À ce jour, ce stablecoin circule sur les réseaux Ethereum, BNB (la blockchain de Binance), et Sui Network.

PayPal (PYUSD), Paxos (USDP), Gemini (GUSD) : les stablecoins supervisés

Ces stablecoins offrent actuellement “les meilleures garanties pour les investisseurs particuliers, car leurs réserves sont directement supervisées par le régulateur”, explique Benjamin Levit, cofondateur et PDG de Bluechip.

Concrètement, ils doivent respecter des exigences de contrôle et d'émission strictes, similaires en de nombreux points à la finance traditionnelle. En cas de faillite, le Département des services financiers de l'État de New York (NYDFS), chargé de les superviser, peut directement saisir les réserves.

Leur disponibilité est actuellement limitée à un nombre restreint de réseaux autorisés par le régulateur, ce qui freine considérablement leur développement.

“Le fait qu'ils soient supervisés par les autorités, et donc facilement censurables, est un argument qui freine leur adoption en dehors des États-Unis et de l'Europe, où cette caractéristique est importante”, indique Sébastien Derivaux, directeur de l'entreprise de conseil Steakhouse Capital. “De plus, pour l'Europe et les États-Unis, ils ne sont pas très utiles pour le moment, puisqu'il existe déjà des solutions de paiement efficaces pour les particuliers”, poursuit-il.

En revanche, leur forte régulation en fait des actifs de choix pour les intégrer dans des protocoles de finance décentralisée qui ont besoin d’une stabilité de prix quasi-parfaite. C'est le cas du DAI (renommé USDS en septembre 2024), où les investisseurs sont incités à en déposer dans le “Peg Stability Module” (PSM) pour maintenir l'ancrage au dollar du stablecoin de Maker (aujourd'hui Sky).

Le marché naissant des stablecoins euros

Actuellement, la demande pour les stablecoins en euros est quasi inexistante, ne représentant que 0,2 % des stablecoins en circulation. L'EURC de Circle domine ce marché embryonnaire avec 57 millions d'euros en circulation. Cependant, l'entrée en vigueur du premier volet de MiCA (Markets in Crypto-Assets) en Europe encourage de nombreux acteurs traditionnels à se lancer dans ce secteur.

Cet été, deux banques ont obtenu l'agrément officiel pour émettre des stablecoins. La Société Générale, via sa filiale SG-Forge, a déployé le CoinVertible (EURCV) sur Ethereum en avril 2023. Banking Circle, une fintech luxembourgeoise fondée en 2016 et détentrice d'une licence bancaire depuis 2020, a lancé l'EURITE le 26 août. Ce dernier, listé sur Binance, affiche une capitalisation d'environ 30 millions d'euros.

Selon nos sources, de nombreux acteurs s'apprêtent à entrer sur ce marché naissant. Olivier Mammet, responsable du trading chez Gemini, une plateforme d'échange américaine, explique : "Actuellement, l'avantage du premier arrivé reste crucial dans l'écosystème crypto. Tous les acteurs ont en tête la réussite de Tether et Circle avec le dollar."

Ce qu’il faut retenir des stablecoins centralisés

Si les stablecoins centralisés comme l'USDT ou l'USDC ont connu le succès, c'est en grande partie grâce à la simplicité et à la fiabilité de leur gestion des réserves. Bien que certains modèles restent dépendants des banques — comme l'a démontré l'USDC lors de la crise bancaire américaine au printemps 2023 — les stablecoins centralisés s'avèrent être de véritables machines à cash dans un contexte de taux d'intérêt élevés.

Conçus initialement pour un usage institutionnel, ces stablecoins sont désormais de plus en plus adoptés pour les paiements courants.

Cependant, leur décision de ne pas partager les revenus générés avec leurs utilisateurs, principalement pour des raisons réglementaires, a ouvert la voie à l'émergence d'autres initiatives de stablecoins — cette fois-ci décentralisées — offrant cette fonctionnalité.

Les stablecoins décentralisés

Contrairement aux stablecoins "centralisés" comme ceux de Circle ou Tether, la stratégie du protocole n'est pas décidée unilatéralement par une entité centrale. Elle est plutôt gérée par une organisation autonome décentralisée (DAO) à laquelle peuvent participer les détenteurs de jetons de gouvernance. Dans le cas de MakerDAO — rebaptisé Sky à l'été 2024 — il s'agit du jeton MKR.

👉 Lire notre analyse complète de Maker et son rebranding en Sky

Le DAI, 1er stablecoin décentralisé d’envergure

Le DAI, lancé par MakerDAO en décembre 2017 sur Ethereum, est le premier stablecoin décentralisé largement adopté en finance décentralisée (DeFi). Initialement, MakerDAO promettait de garantir l'incensurabilité de son stablecoin en n'acceptant dans ses réserves que des actifs insaisissables comme l'ether (ETH) ou le bitcoin (BTC). Cette promesse est moins vraie aujourd'hui.

Le DAI repose sur un concept novateur : la position de dette collatéralisée (CDP). Les utilisateurs déposent des cryptomonnaies pour créer et emprunter un stablecoin, qu'ils devront rembourser avec intérêts pour récupérer leur dépôt. Ce mécanisme permet à chacun d'utiliser un effet de levier sur son capital.

Cependant, les CDP ont une limite : les emprunts doivent toujours être couverts par des dépôts surcollatéralisés. La valeur du collatéral étant volatile, le protocole doit maintenir une marge suffisante pour liquider ce collatéral avant que sa valeur ne devienne inférieure à celle du prêt accordé. Cela réduit l’efficacité du capital.

Le DAI permet également d’avoir un rendement s’il est staké dans son “Saving Module”.

Dans sa nouvelle roadmap, Sky entend favoriser l’émergence d’un nouveau DAI (nommé USDS) qui disposera de nouvelles caractéristiques (dont la capacité de geler des adresses, ce qui n’est pas possible avec le DAI) dans le but d’augmenter son usage institutionnel.

En 2023, Curve et Aave ont aussi lancé leurs propres stablecoins : le crvUSD et le GHO, qui reposent aussi sur le modèle des CDP. Le crvUSD a la particularité d’avoir introduit le concept de “soft liquidation” qui permet une liquidation progressive des prêts.

On peut aussi noter Angle qui a été le premier protocole à émettre un stablecoin euro décentralisé : l’EURA, mais ce type d’actif n’a encore qu’une demande limitée, l’USDA (son équivalent dollar) est ensuite venu compléter leur offre.

LUSD & BOLD : Radicalement résistants à la censure

La plupart des modèles de CDP, dont le DAI, ont intégré des stablecoins centralisés ou des RWA (bons du Trésor ou obligations tokenisées) dans leurs réserves. Cette stratégie vise à augmenter efficacement la quantité de leur stablecoin en circulation et à générer des rendements. Cependant, le revers de la médaille est qu'une partie des réserves de ces stablecoins “décentralisés” peut être gelée par des entités centralisées.

Le LUSD, émis par Liquity V1, est souvent considéré comme le stablecoin le plus résilient. Il n'accepte que de l'ETH comme collatéral, son smart contract est définitivement immuable, et le taux d'emprunt n'est payé qu'une seule fois, à la création du prêt. Néanmoins, la pool de stabilité (SP) peut parfois forcer la liquidation de prêts bien avant leur seuil de liquidation.

Le smart contract de Liquity V2, également immuable, émettra le BOLD. Ce nouveau stablecoin acceptera deux tokens supplémentaires en collatéral : le stETH et le rETH, tokens de staking liquide émis respectivement par Lido et Rocket Pool.

De plus, Liquity V2 offrira aux utilisateurs la possibilité de fixer et d'ajuster leurs taux d'emprunts annuels à volonté. La pool de stabilité (SP) privilégiera la liquidation des prêts aux taux les plus bas, assurant ainsi un équilibre dans diverses conditions de marché.

Les stablecoins qui redistribuent leurs rendements

Également appelés "Yield Bearing", ces stablecoins visent à offrir une valeur stable à leurs détenteurs tout en procurant un rendement passif. L'idée est de partager avec les utilisateurs une partie des rendements générés par les actifs sous-jacents. Contrairement au DAI, il n'est pas nécessaire de les staker pour bénéficier du rendement.

En juin dernier, la fintech américaine Paxos a lancé un stablecoin centralisé nommé "Lift dollar" (USDL). Celui-ci permet à ses détenteurs d'obtenir un rendement de 5 % généré par sa réserve composée de bons du Trésor américain.

Avec ce stablecoin, Paxos cible principalement le marché argentin, qui fait face à une inflation à deux chiffres depuis plusieurs années. D'autres stablecoins similaires ont récemment vu le jour, comme l'USDM émis par Mountain Protocol.

L'USDY, émis par Ondo, est actuellement le stablecoin le plus adopté de cette catégorie. Adossé à des bons du Trésor américain à court terme et à des dépôts bancaires, il est accessible aux investisseurs individuels et institutionnels non américains.

👉 Lire notre analyse complète d'Ondo

Actuellement, le développement de ces stablecoins est considérablement freiné par la réglementation. Aux États-Unis, la Securities and Exchange Commission (SEC), le gendarme boursier américain, menace de requalifier ce type de produit en titre financier (security).

En Europe, la réglementation MiCA interdit aux émetteurs régulés d'offrir un rendement direct à leurs utilisateurs. Cette interdiction n'a jamais été clairement justifiée publiquement. Plusieurs experts interrogés par The Big Whale soulignent le risque potentiel de concurrence avec les banques que pourrait engendrer cette pratique.

La décentralisation avec Usual

Parmi les stablecoins de cette catégorie avec des prétentions de décentralisation, on trouve l'USD0, émis par Usual. C'est une sorte d'agrégateur de RWA (Real World Assets). Actuellement, les réserves du protocole se composent uniquement d'USYC, la représentation on-chain du Short Duration Yield Fund (SDYF) émis par l'entreprise américaine Hashnote. Le SDYF est constitué de bons du Trésor américain à court terme.

Les détenteurs d'USD0 ne bénéficient d'aucun rendement direct, mais ils pourront bientôt bloquer leurs tokens pour obtenir de l'USD0++. Les détenteurs d'USD0++ auront deux options : soit récupérer des récompenses immédiates sous forme de tokens de gouvernance USUAL, soit percevoir tous les six mois les rendements générés par les actifs de la réserve. L'USD0++ arrive à maturité au bout de 4 ans, libérant alors l'USD0 bloqué. Avant cela, il sera possible de les échanger sur le marché secondaire.

Les principaux défis pour Usual seront de continuer à accroître la quantité d'USD0 en circulation après la campagne d'airdrop et de gérer les risques de liquidité liés à la longue période de maturation des USD0++.

Le principal problème lié à la multiplication de ces émetteurs de stablecoins est qu'ils entrent tous en compétition pour l'adoption et la liquidité de leurs tokens respectifs. L'émergence de standards communs, permettant à différents acteurs d'émettre un même stablecoin fongible, pourrait être la solution à ce dilemme.

M^0 : standardiser et démocratiser l’accès à l’émission monétaire

Jusqu'à présent, aucun stablecoin décentralisé n'a réussi à rivaliser avec l'USDC, et encore moins avec l'USDT. Lancer son propre stablecoin et parvenir à le faire adopter par les utilisateurs est un véritable défi, car les leaders du domaine bénéficient de puissants effets de réseau. La distribution est le nerf de la guerre.

En effet, le marché des stablecoins présente d'énormes barrières à l'entrée : la liquidité d'un stablecoin est cruciale pour son adoption par les grands acteurs. La quasi-totalité des paires de trading sont libellées en USDT et USDC. Ces stablecoins sont également intégrés dans la plupart des plateformes centralisées et décentralisées, et ont réussi à établir une relation de confiance avec leurs détenteurs.

M^0 part du principe que les différentes plateformes avec lesquelles interagissent les utilisateurs (échanges centralisés et décentralisés, wallets, applications, etc.) jouent un rôle majeur dans la distribution et le succès des stablecoins.

M^0 souhaite donc s'appuyer sur ces plateformes en leur permettant d'émettre un même stablecoin fongible, le "M", et de collecter des rendements liés aux M qu'elles distribuent, plutôt que de participer à la distribution de stablecoins qui ne leur profitent pas. Les plateformes adoptant le M auraient ensuite la possibilité de partager ou non ces rendements avec leurs utilisateurs.

La gouvernance du protocole élit des "Minters" capables d'émettre du M. Pour ce faire, les Minters doivent bloquer des bons du Trésor américain à court terme auprès de dépositaires éligibles, ces actions étant surveillées et approuvées par des validateurs du protocole.

L'idée est donc de créer un ensemble de standards communs (notamment sur les dépositaires et le type de collatéral) pour tous les Minters, afin que le plus grand nombre d'entités puissent émettre un même stablecoin fongible. Cela élimine de nombreuses barrières à l'entrée pour les émetteurs de stablecoins, qui doivent normalement parvenir à créer un nouveau stablecoin suffisamment liquide et adopté sur les différentes plateformes centralisées et décentralisées.

Les validateurs du protocole fournissent une attestation quotidienne des réserves des Minters, ces derniers devant également obtenir l'autorisation des validateurs pour vendre les actifs de leur réserve. Ce système offrirait donc une meilleure transparence que les émetteurs de stablecoins centralisés.

La gouvernance de M^0 repose sur un système à deux tokens : le POWER (ayant un rôle de gestion active) et le ZERO (ayant un rôle de gardien). Les détenteurs de POWER reçoivent des ZERO lorsqu'ils participent à la gouvernance du protocole, et les frais générés par le protocole sont distribués aux détenteurs de ZERO.

Le protocole est encore en phase de pré-lancement ; il reste à voir comment il parviendra à concrétiser ses ambitions.

Les autres types de stablecoins

Alors que des acteurs plus traditionnels comme BlackRock commencent à déployer des produits on-chain, le terme « stablecoin » tend de plus en plus à recouvrir des réalités différentes de ses cas d'usage originaux tels que l'achat de crypto ou la collatéralisation de positions en DeFi.

Les “fonds monétaires tokenisés”

Le meilleur exemple de ces nouveaux types de produits sont les fonds monétaires tokenisés. Ils permettent à leurs détenteurs de percevoir le rendement issu principalement d'obligations d'État.

Leurs émetteurs proposent un système d'investissement désintermédié, mais sont nettement plus contraints en matière de réglementation. En effet, les tokens ne sont échangeables qu'entre personnes autorisées et ne peuvent donc pas, pour le moment, être utilisés pour collatéraliser des positions en DeFi.

Le plus célèbre d'entre eux est le BUIDL, déployé par BlackRock sur Ethereum en mars dernier. C'est actuellement celui qui a connu le plus de succès, attirant 520 millions de dollars. Plusieurs protocoles, comme Aave — leader des protocoles de prêt et d'emprunt — ont d'ailleurs annoncé vouloir l'intégrer dans leurs réserves à des fins de diversification.

En juin dernier, le français Spiko a lancé deux produits similaires (en euro et en dollar) qui totalisent déjà près de 90 millions de dollars d’encours.

Certains acteurs, comme le gestionnaire d'actifs américain Franklin Templeton qui a aussi lancé un fonds monétaire tokenisé appelé BENJI, parient qu'il sera un jour possible de s'en servir comme instrument de paiement. Cette utilisation est pour le moment totalement interdite dans des juridictions comme les États-Unis ou l'Europe.

Les “produits structurés”

La plupart des stablecoins se ressemblent dans le sens où ils sont presque tous adossés à des bons du Trésor ou des obligations à faible risque. L'objectif est d'avoir une réserve d'actifs générant des rendements et dont la valeur n'est pas volatile.

Toutefois, il existe d'autres moyens d'obtenir des positions à rendement qui sont peu sensibles à la volatilité des marchés.

La réserve de valeur de l'USDe, émis par Ethena, est assurée en partie par une stratégie de “basis trade” : une position “short” est ouverte pour couvrir la volatilité des actifs de la réserve (BTC & ETH) tout en bénéficiant des rendements du “funding rate”.

👉 Lire notre analyse complète d’Ethena

L'USDe est le stablecoin ayant connu le lancement le plus explosif des dernières années. Il a atteint le seuil de 3 milliards de tokens en circulation en seulement 6 mois et a été rapidement intégré dans la plupart des applications DeFi ainsi que dans certains échanges centralisés comme Bybit.

Toutefois, sa croissance stagne, voire régresse, à cause des conditions de marché qui ont provoqué une chute du funding rate. L'USDT représente ainsi désormais quasiment un tiers de ses réserves.

Il sera intéressant de suivre l'évolution de ce type de stablecoins dont la réserve de valeur est sécurisée par des positions de trading. Ils tirent profit de la composabilité permise par les blockchains et permettent la mise en place de stratégies de trading plus complexes.

Le cash interbancaire de JP Morgan

Très différent des autres projets, le JPM Coin est un stablecoin visant à améliorer les transferts interbancaires au sein des flux de la banque américaine JP Morgan. Fin 2023, le géant bancaire a déclaré gérer l'équivalent d'un milliard de dollars de transactions quotidiennes avec ce système.

Le fonctionnement est simple : en échange d'un dépôt en euro ou en dollar sur l'un de ses comptes bancaires, l'utilisateur reçoit l'équivalent en actifs numériques. Ces derniers sont alors instantanément transférés via le réseau Onyx, une blockchain privée inspirée d'Ethereum. Cette infrastructure garantit la confidentialité des échanges et un haut débit de transaction. De plus, le système promet d'opérer 24 heures sur 24 et 7 jours sur 7.

Le JPM Coin se distingue par sa conception unique : il est destiné à exister exclusivement au sein de l'écosystème JP Morgan.

L'avis général de The Big Whale sur les stablecoins

La guerre des stablecoins bat son plein, et de plus en plus d'acteurs entrent dans la compétition pour s'emparer de parts de ce marché en pleine expansion. Le modèle économique actuel favorise largement les émetteurs.

La liquidité et l'adoption sont les deux facteurs clés assurant la croissance d'un stablecoin. Ces éléments sont étroitement liés à leur mode de distribution. L'USDT de Tether s'est initialement répandu grâce à son intégration sur toutes les plateformes de trading centralisées, tandis que l'USDC a bénéficié du soutien de Coinbase.

La distribution apparaît donc comme le vecteur central du succès d'un stablecoin. Pour s'imposer face à Tether et Circle, il est nécessaire de trouver de nouvelles voies de distribution. Cela explique la croissance du PYUSD de PayPal, émis par une entreprise disposant d'une large base d'utilisateurs au-delà de la crypto. De même, il n'est pas surprenant que Revolut envisage de lancer son propre stablecoin.

Une partie de la population d'Amérique du Sud, d'Afrique et d'Asie du Sud a adopté les stablecoins en dollars pour se protéger de l'inflation des monnaies locales. Ces stablecoins ne nécessitent pas de compte bancaire et facilitent tous types de paiements, notamment les transferts transfrontaliers dans le cadre des remises.

Le dollar représente plus de 99 % du marché actuel des stablecoins. Les émetteurs de ces stablecoins deviennent ainsi des canaux de distribution du dollar à l'échelle mondiale.

Il reste à voir comment les réglementations étatiques encadreront l'utilisation des stablecoins et si les banques devront se réinventer, potentiellement en devenant elles-mêmes émettrices de stablecoins.

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