Connaissez-vous “Rules”, un jeu de cartes NFT qui permet de soutenir financièrement son rappeur préféré ? Ce projet lancé en 2022 par la chaîne YouTube “Le Règlement” est un modèle du genre en termes de démocratisation de la technologie blockchain. Pourquoi ? Tout simplement parce que vous ne savez même pas que le jeu fonctionne avec de la… blockchain. Malin évidemment !
La force d’un jeu comme Rules, c’est qu’il n’est jamais demandé à l’utilisateur de :
se créer un portefeuille numérique. de conserver sa "seed phrase", c’est-à-dire le mot de passe de 12 ou 24 mots servant de clé de récupération du portefeuille (en cas de perte du mot de passe). d’avoir des cryptomonnaies dans son portefeuille. 👉 Avec Rules, il faut juste se créer un compte avec un identifiant et un mot de passe, un peu comme dans le bon vieux monde du “Web2”.
Le wallet (portefeuille numérique) est en réalité intégré dans le compte utilisateur. On peut acheter les cartes NFT par carte bancaire et les échanger avec d’autres fans sur le site de Rules sans être un expert des cryptos.
Le seul élément rappelant l’univers crypto est la mention du prix des cartes à la fois en Ether, la cryptomonnaie de la blockchain Ethereum, et en euro.
L’avantage de ce système, c’est qu’il emprunte le meilleur de l’univers blockchain, c’est-à-dire la rareté numérique (on possède vraiment sa carte), sans en prendre les inconvénients, grâce à un système de portefeuille très simple.
“Rules” n’est évidemment pas la seule société à avoir opté pour un tel système. La licorne française, Sorare, qui est l’un des leaders mondiaux dans le sport et les cartes NFT , a aussi déployé un système similaire. Seule différence avec Rules, Sorare est développé sur une blockchain spécialement conçue pour le jeu (StarkEx).
Rules est en revanche l’une des premières applications du genre construites sur un réseau totalement ouvert : StarkNet, une couche secondaire d’Ethereum, dit aussi “layer 2” (lire notre rapport sur le sujet) .
“L’account abstraction”, LA solution pour le grand public
Derrière la simplicité de Rules et d’autres projets web3, on retrouve un standard qui a été récemment développé sur les blockchains : “l’account abstraction” ou "abstraction de compte" en bon français.
Pas de panique, derrière ce terme un brain barbare se cache en réalité quelque chose d’assez simple : jusqu'à présent, pour contrôler un portefeuille numérique et faire des transactions (envoyer de l’argent par exemple), vous deviez utiliser, à chaque fois, votre clé privée.
Or avec l'abstraction de compte ce n'est plus le cas. Vous n’avez plus besoin d’utiliser votre clé privée (mot de passe complexe) à chaque fois. A la place, vous pouvez utiliser des mots de passe plus simples ou des systèmes de reconnaissance biométrique ou faciale.
StarkNet est clairement le réseau de la famille d’Ethereum le plus en avance sur le sujet.
“Ce genre de solution va permettre à de plus en plus de personnes de se créer des portefeuilles numériques et d’avoir des crypto actifs”, explique Henri Lieautaud, professeur à l’école supérieure d'ingénieurs Léonard-de-Vinci (ESILV) à Courbevoie et en charge des relations avec les développeurs StarkNet.
“Je suis persuadé que d’ici deux ou trois ans nous verrons des applications Web3 toucher des gens qui n’ont jamais eu de cryptos”, insiste-t-il.
Utiliser des applications Web3 avec Face ID
“L’abstraction de compte” présente également d’importantes perspectives dans le gaming Web3. Qui aurait envie de signer des messages avec son wallet à chaque interaction dans un jeu ? Posez la question, c'est déjà y répondre.
“Ce nouveau standard permet d’offrir des expériences plus immersives où le joueur n’est pas dérangé toutes les 30 secondes pour valider une opération sur la blockchain”, explique Itamar Lesuisse, le patron d’Argent, un wallet qui a parié très tôt sur “l’abstraction de compte".
Ce système est également compatible avec n'importe quelle autre genre d'application.
“Aujourd’hui, je peux signer des transactions crypto en utilisant Face ID sur mon iPhone. C’est le même système d’authentification que mon application bancaire”, souligne Henri Lieautaud.
“Les entrepreneurs qui sont davantage focalisés sur le produit plutôt plutôt que sur les questions d’infrastructure ont bien compris le bénéfice”, assure-t-il.
Il est illusoire de penser qu’un jour l'intégralité des utilisateurs sauront gérer seul leur wallet. Alors qu’Internet existe depuis près de 30 ans, beaucoup d’internautes continuent de reproduire les mêmes erreurs en inscrivant leurs mots de passe sur un bout de papier qu’ils laissent trainer ou en choisissant “123456”.
Le Web3 ne pourra pas se développer sans des solutions suffisamment sécurisées pour alléger la charge de la gestion d’une clé privée.
En ce sens, comme l’a rappelé hier le co-fondateur d'Ethereum, Vitalik Buterin, lors de l’Ethereum Community Conference à Paris (où The Big Whale est évidemment présent 🐳), “l’abstraction de compte” est probablement l’une des plus grandes avancées récentes de l’écosystème.