Alors qu'Ethereum est fortement concurrencé par les blockchains de type Layer 1 (Solana, Sui, etc.) qui permettent de réaliser des transactions très rapidement et pour des coûts modiques, une partie de sa communauté s'active pour faire évoluer sa couche de base.
Le chercheur Justin Drake, qui officie à la Fondation Ethereum, a présenté mardi à Bangkok lors de la DevCon (l'un des plus grands événements mondiaux sur le sujet) une proposition qu'il nomme « Beam Chain », que certains ont rapidement présentée comme « ETH 3.0 ».
Beam Chain, qu'est-ce que c'est ? C'est une mise à niveau de sa couche de consensus qui viserait à accélérer la création de nouveaux blocs de transactions toutes les 4 secondes (actuellement, il y a un bloc toutes les 12 secondes). Elle exploiterait de nombreuses innovations que la Beacon Chain (la chaîne de consensus actuelle) ne supporte pas, dont les zk-SNARKs, un type de preuve cryptographique qui applique des protocoles de connaissance zéro.
Ainsi, Ethereum pourrait fonctionner comme un zkEVM nativement, comme c'est le cas des layers 2 les plus évolués technologiquement, comme ZkSync ou Linea . Cela pourrait accélérer considérablement le traitement des transactions car les validateurs du réseau n'auraient plus nécessairement besoin de ré-exécuter l'ensemble des transactions des blocs qu'ils reçoivent et auraient donc simplement à vérifier une preuve mathématique qui atteste de leur validité.
Ce qu'il faut comprendre, c'est que la Beacon Chain a déjà 5 ans et qu'elle pourrait être remplacée par une technologie plus compétitive.
Est-ce un changement majeur de la roadmap ? Non, ces évolutions ont déjà été annoncées dans la feuille de route présentée par Vitalik Buterin à partir de 2022. En revanche, la proposition de Justin Drake consiste à avancer le développement de certaines évolutions qui étaient programmées plus tard. Cela s'explique par la plus grande maturité des développeurs à propos de technologies qui étaient jugées trop nouvelles auparavant.
>> Lire aussi - Les grands challenges qui attendent Ethereum
Qu'est-ce que ça change pour les validateurs ? Globalement, le temps de finalité serait réduit, mais cela permettrait surtout de créer des nœuds à 1 ETH, contre 32 actuellement. Un tel changement favoriserait encore davantage la décentralisation du réseau, sans pour autant faire de compromis sur la rapidité de la blockchain lors du consensus.
Un hard fork serait-il nécessaire ? La plupart des mises à jour structurelles d'Ethereum nécessitent un hard fork, c'est-à-dire que les utilisateurs devront choisir d'opter pour un nouveau logiciel s'ils souhaitent continuer à utiliser le même protocole. Un consensus de la commauté sera donc nécessaire pour adopter cette proposition.
Qu'est-ce que ça changerait pour les layers 2 ? La communauté Ethereum a fait le choix de favoriser le développement de solutions de couches secondaires, dites « layers 2 », afin de soulager la blockchain principale de plusieurs opérations et offrir des frais modiques pour ceux qui les utilisent, tout en bénéficiant de la sécurité du layer 1 Ethereum.
La mise à jour Beam Chain pourrait rendre Ethereum plus efficace, mais compte tenu du développement rapide de l’écosystème il sera toujours nécessaire qu’un grand nombre de transactions soient assurées par les L2.
>> Lire aussi - Layers 2 Ethereum : État des lieux et défis
Ce qu’en disent les experts : Interrogé par The Big Whale lors de la Devcon de Bangkok, le cofondateur d'Ethereum Joe Lubin (CEO de Consensys, l'entreprise américaine à l'origine du développement du layer 2 Linea) a insisté sur les bénéfices de cette mise à jour : « Nous sommes très excités par cette proposition. Après avoir été dans une phase de divergence qui nous a apporté de la scalabilité, mais également de la fragmentation, cette phase de convergence vers le principe porté par les zkEVM va permettre à notre écosystème de ressembler à un esemble cohérent, pour les développeurs de logiciels et les utilisateurs. »
Est-ce vraiment pertinent de parler d'« ETH 3.0 » ? Selon Justin Drake, ce n'est pas adapté, néanmoins la communauté semble reprendre cette appellation qui a le mérite d'être très percutante. Pour rappel, ce que nous appelons « ETH 2.0 » est la version actuelle d'Ethereum depuis sa migration vers l'algorithme de consensus en Proof of Stake, dont l'implémentation s'est étendue de fin 2020 (lancement de la Beacon Chain) à septembre 2022. Elle a succédé au mécanisme de minage qui reposait sur la dépense d'énergie via la puissance de calcul informatique pour valider les transactions.
Quel calendrier ? Si la communauté parvenait à s'entendre sur le bien-fondé de cette proposition (une discussion pourrait s'étendre tout au long de l'année 2025), le code pourrait commencer à être écrit d'ici 2026, ouvrant la voie à une longue phase de test, puis une mise en production à l'horizon 2029-2030.