Il y a quelques jours, l'association de la Crypto Valley a organisé sa première réunion annuelle sur les banques et la crypto à Genève. La conférence, qui s'est tenue dans les locaux de la Fédération des Entreprises Romandes, a réuni plus de 300 personnes venues de toute l'Europe.
J'étais à cette conférence, et l'effervescence autour des cryptomonnaies était encore presque inédite. Interrogé sur scène au sujet de la stratégie des banques, Nicolas Vradis, qui est un peu le monsieur crypto du canton voisin de Neuchâtel , a souri et expliqué que c'était "simple": "Innover, suivre ou mourir".
Le commentaire de Nicolas Vradis a fait sourire toute la salle. Une partie - celle réunissant les banquiers - parce qu'elle s'est sûrement sentie challengée, et l'autre - celle des acteurs crypto - parce qu'elle a eu l'impression qu'il était enfin possible d'assumer publiquement quelque chose qui ne l'était pas il y a encore peu: les cryptomonnaies sont incontournables pour les banques.
Le fait que ce soit un représentant de Neuchâtel qui dise cela est encore plus symbolique dans la mesure où le canton, qui a toujours été vu comme un havre pour les entreprises crypto, a récemment pris des mesures contre le secteur. La Banque Cantonale de Neuchâtel (BCN) a gelé ces derniers mois les comptes de nombreuses entreprises crypto sans donner trop d'explications.
La question est de savoir si Genève pourrait en profiter. Or, si la conférence a attiré beaucoup de (beau) monde, comme évidemment Swissquote et Arab Bank Switzerland, plusieurs autres banques suisses, qui ont pourtant des bureaux à Genève, étaient notablement absentes. C'était le cas de Lombard Odier, Pictet, ou même UBS…
Des clients qui font bouger les lignes Faut-il pour autant s'en inquiéter ? Je ne le pense pas. Les banques privées genevoises sont connues pour leur capacité à s'adapter à la demande de leurs clients, et donc, tôt ou tard, elles finiront par s'y mettre si ce n'est pas déjà le cas de manière très discrète.
Ce qui est sûr, c'est que la décision de la Banque Cantonale de Neuchâtel paraît, a posteriori, totalement à contre-courant avec l'évolution récente du cours du bitcoin. Depuis le début de l'année, le bitcoin s'est apprécié de plus de 50%, et vu le contexte, avec les ETF Bitcoin et l'arrivée du Halving, la dynamique pourrait rester importante.
Et pendant ce temps-là, le consommateur ne cesse d'évoluer. Comme l'a rappelé très justement sur scène Elodie Trevillot, qui est la responsable de la conformité chez Delubac & Cie, "en France, il y a aujourd'hui autant de gens qui ont des produits d'investissements classiques que des cryptos".
Un point de vue partagé par d'autres experts du sujet. "Il y a quelques fintechs qui sont en pointe sur le sujet," a rappelé de son côté Paolo Bortolin, qui est une sorte de ministre des finances de Lugano. "Ces acteurs prendront le marché et si les banques hésitent trop longtemps il sera trop tard pour elles”.
Le directeur de la Chambre de commerce de Genève (CCIG), Vincent Subilia, a ajouté que les banques doivent être des alliées et pas un obstacle pour le secteur crypto. "Nous ne voulons pas que les banques soient le goulot d'étranglement pour le développement d'une industrie aussi prometteuse."
En attendant, certaines banques suisses comme Amina Bank et Sygnum Bank ont commencé à nouer des partenariats avec les banques traditionnelles pour les amener doucement dans le nouveau paradigme - y compris la Zuger Kantonalbank.