Restaking et EigenLayer : une nouvelle vague d’opportunités
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Dans le sillage de l'explosion du liquid staking, une nouvelle innovation a pointé le bout de son nez et attire déjà l’attention de l’écosystème : le restaking. En clair, cela permet de sécuriser des blockchains en s’appuyant sur la robustesse d’Ethereum, notamment via l’utilisation des tokens de liquid staking, comme le stETH de Lido.
Pour les stakers, cela permet de gagner des récompenses issues du staking d’Ethereum, mais également de toutes les autres blockchains qu’ils participent à sécuriser. À l’arrivée, des gains substantiels à partir d’une même valeur immobilisée. Pour certains, cela peut être décrit comme du staking avec effet de levier. “Tous les spécialistes ont identifié le restaking comme une innovation majeure”, déclare Laszlo Szabo, le PDG Kiln, une start-up française qui offre des services touchant au staking pour les institutionnels. Pour Stanislas Barthélémi, expert crypto pour KPMG, “c’est davantage une innovation économique que technologique, mais c’est une proposition qui a du sens”.
EigenLayer, projet phare du restaking
EigenLayer est le plus gros représentant de ce segment. Le projet a publié son livre blanc en février 2023 et bouclé une Série A de 50 millions de dollars le mois suivant menée par Blockchain Capital. Lancé sur le mainnet d'Ethereum cet été, ce protocole a déjà réussi à attirer plus d'un milliard de dollars d'actifs. Et ce, même si pour le moment, l'infrastructure est encore en phase d'élaboration. Le projet a démarré en 2021 sous l'impulsion de Sreeram Kannan, un ancien professeur assistant à l'Université de l'État de Washington où il travaillait notamment sur la question des blockchains.
"Ce que propose EigenLayer pourrait changer la manière de concevoir la sécurité sur Ethereum et des blockchains en général", explique Barnabé Monnot, chercheur à la Fondation Ethereum, la principale structure qui soutient le développement du protocole. "La réputation de l'équipe parle pour elle, elle est identifiée depuis longtemps par la communauté", note ce spécialiste qui travaille directement sur ce sujet.
Son potentiel va au-delà de la sécurisation d'autres blockchains : EigenLayer pourrait également participer à la sécurisation d'autres projets d'infrastructure, des dApps ainsi que des layers 2. Il serait alors théoriquement plus facile d'innover puisque l'équipe d'un projet n'aurait pas à s'occuper de toute la partie sécurité pour se lancer.
Et EigenLayer ne compte pas s'arrêter en si bon chemin : le projet prévoit également de lancer Eigen DA (une blockchain spécialisée dans la disponibilité des données), fonctionnant sur la même narrative que les blockchains modulaires, comme Celestia. Ces dernières proposent de stocker les données d'autres blockchains qui n'auraient alors qu'à gérer l'exécution des transactions, ce qui permet une meilleure scalabilité et une baisse des frais de transaction.
Les poids lourds du secteur se mettent en place
Pour le moment, les investisseurs ont déjà la possibilité de staker leurs ETH ou leurs tokens de liquid staking chez EigenLayer. En revanche, il n'est pas encore possible de toucher les récompenses associées mais plutôt des "points Eigenlayer" dont les détenteurs espèrent qu'ils donneront accès à un airdrop dans les mois qui viennent. En attendant, les poids lourds du staking comme Lido s'organisent pour faciliter l'accès à EigenLayer à leurs utilisateurs, ce qui permettrait de rendre plus accessible le restaking pour les non-initiés, estime Barnabé Monnot : "Nous avons remarqué que de nombreux utilisateurs stakant leurs ethers n'utilisaient pas leur jeton de liquid staking à cause de la complexité que peut représenter l'optimisation du capital, EigenLayer pourrait simplifier cette procédure". Ainsi, les utilisateurs de Lido pourraient être directement connectés aux services de restaking d'EigenLayer.
Un risque pour la sécurité d'Ethereum ?
Dans un billet de blog, la figure emblématique d'Ethereum, Vitalik Buterin, a tout de même averti des dangers du restaking pour la sécurité et l’économie d’Ethereum. La première serait le risque en chaîne de slashing (une pénalité si le validateur ne fait pas bien son travail, ndlr). "En cas de problème sur l'un des réseaux, cela pourrait avoir des répercussions en cascade sur tous les réseaux qu'il participe à sécuriser et sur Ethereum en premier lieu", avertit Laszlo Szabo. "En cas d'action malveillante, tout Ethereum ne serait pas menacé directement mais les pertes économiques ainsi que la réputation du réseau pourraient en pâtir", analyse Barnabé Monnot. Tout l'écosystème qui se créerait via la sécurité d'EigenLayer pourrait ensuite être directement menacé. Mais Laszlo Szabo se veut rassurant : "Je ne doute pas qu'il y aura des barrières mises en place à l'utilisation d'EigenLayer par la communauté pour limiter ces risques systématiques pour Ethereum".