Du bitcoin dans les contrats d’assurance-vie ?
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L'intégration de produits financiers basés sur des actifs numériques dans les contrats d'assurance-vie représente un tournant potentiel dans le secteur financier. À ce jour plusieurs options permettent d’envisager l’intégration d’une petite part de bitcoins dans ce placement star des Français (2000 milliards d’euros d’encours en 2023).
“Les assureurs sont l’une des cibles que nous visons pour nos produits”, indique Marina Beaudean, en charge de la France et du Benelux pour 21Shares, l’un des principaux émetteurs d’ETC.
Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si les sociétés comme 21Shares ou CoinShares nourrissent de sérieux espoirs pour être logés dans des contrats d’assurance-vie : les assureurs refusent pour le moment de loger des bitcoins physiques dans leurs offres.
“Les assureurs se saisiront probablement du sujet via des produits repackagés qui ne se baseront pas sur de la détention pure de crypto-actifs”, prévient Arnaud Grünthaler, avocat associé pour le cabinet Fieldfisher. “Je pense qu’ils se tourneront vers des produits financiers qui rentrent dans une nomenclature classique compatible avec la directive européenne MiFID”, insiste-t-il.
“Pour la plupart des investisseurs, le plus simple est de se tourner vers des produits créés par des sociétés de gestion accréditées par l’AMF et accessibles dans des enveloppes fiscales”, indique Enzo Hallot, à la tête du cabinet de conseil en investissements Crypto Patrimoine et membre de l’Association nationale des conseillers financiers (Anacofi).
L’avantage des instruments financiers réglementés, c’est qu’ils peuvent être placés dans des comptes-titres. Et surtout, c’est le type de placement le plus répandu dans les assurances-vie.
À ce jour, une poignée d’acteurs évoluant dans les actifs numériques répondent à la norme européenne UCITS (qui encadre les OPCVM), comme Melanion Capital, dont l’ETF lancé fin 2021 regroupe des actions d’entreprises cotées en Bourse aux États-Unis et qui appartiennent au secteur du bitcoin, mais aussi certains fonds du gestionnaire d’actifs Tobam (BTC-Linked and Blockchain Equity Fun et BITCOIN CO2 Offset Fund).
L’ETF de Melanion n’étant pas directement composé d’actifs numériques, sa performance ne suit pas strictement le cours du bitcoin. Néanmoins, comme il compte des sociétés comme Microstrategy, Coinbase ou des acteurs du minage (dont la dynamique boursière est historiquement fortement corrélée au bitcoin), il a été conçu pour s’en approcher le plus possible.
“Parfois nous sous-performons le bitcoin, parfois nous le sur-performons, mais la réalité c’est qu’on le suit”, souligne Cyril Sabbagh, managing director chez Melanion Capital. Fin 2023, l’ETF de Melanion avait 5 millions d’euros sous gestion et celui-ci devrait grossir avec l’engouement déclenché par l’arrivée d’un ETF Bitcoin lancé par BlackRock aux États-Unis. “Lorsque la demande arrivera, nous aurons le produit parfait pour inclure la thématique bitcoin dans les contrats d’assurance-vie ou de plan épargne retraite”, insiste Cyril Sabbagh.
“Ce type d’offre, comme celle de Tobam ou Melanion, sont l’une des plus simples pour les institutionnels qui souhaitent s’exposer à Bitcoin dans un cadre régulé”, complète Enzo Hallot.
Pour ceux qui préfèrent un véhicule basé sur une réserve en bitcoins pour suivre plus fidèlement le cours, il faut se tourner vers les ETC de CoinShares ou 21Shares. Ces derniers sont juridiquement des titres de créance et non une copropriété (comme les ETF), mais cela ne fait pas beaucoup de différence pour l’investisseur.
En revanche, ils ne répondent pas à la norme UCITS, ce qui rend plus difficile leur placement dans les produits d’assurance-vie.
“Il est autorisé de placer des SCPI ou des fonds structurés dans les contrats d’assurance-vie, il est donc possible de mettre nos ETC à condition que l’assureur accepte ce support comme unité de compte”, veut croire Jérôme Castime, en charge de la conformité en France pour CoinShares.
“Même si les clients demandent à leur assureur une exposition aux crypto-actifs, il est très possible qu’ils ne sachent pas les valoriser ou les gérer”, tempère l’avocat Arnaud Grünthaler. “À plus long terme, je pense que l’une des solutions élégantes pourrait être de tokeniser des parts de fonds qui détiennent des actifs numériques et proposer ces security tokens régulés aux investisseurs”, conclut-il.